* L'agressivité subite, la "crise de furie"

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"Crise de furie" agressive du chat :

réagir au mieux en 6 étapes

Dr Jasmine Chevallier, DIE vétérinaire comportementaliste, Janvier 2018

 

Le chat est un animal hypersensible et très réactif.

En cas de panique intense, si la fuite n’est pas possible, l’agression peut devenir la seule façon de se défendre et elle peut être d’une extrême violence, même chez des chats habituellement faciles et sociables.

 

Un épisode agressif subit peut survenir suite à une course-poursuite musclée pour mettre le chat dans sa boite de transport, ou pour le punir ; parfois le chat a eu une peur intense (bruit, animal ou un simple changement d’environnement) ou une grande douleur dont il ne pouvait se soustraire ; parfois les causes restent floues…

 

En cas de crise agressive, le chat perd tout contrôle et agresse n’importe qui : même le propriétaire préféré peut en être victime. Autre particularité, le chat a du mal à « redescendre » et la crise peut se prolonger même quand l’élément déclencheur a disparu. La victime, paniquée, peut alors se retrouvée enfermée dans une pièce, entendant le chat hurler derrière la porte, prêt à reprendre une offensive si quelqu’un passe dans son champ de vision.

 

Cette situation, heureusement rare, est extrêmement traumatisante pour les personnes présentes. Dans une telle situation, le chat n’est pas subitement et définitivement devenu fou : une réaction raisonnée s’impose pour lui permettre de sortir de son état de furie.

 

Etape 1 : évitez la surenchère, isolez le chat

Evitez l’accident (ou le sur-accident). Le débordement émotionnel du chat peut persister plusieurs heures. Dans cet état de tension intense, une nouvelle agression peut survenir, parfois déclenchée par une interaction infime (vocale ou visuelle). Enfermez le chat dans une pièce, si possible celle dans laquelle il se trouve. N’essayez surtout pas de reprendre contact avec lui, ni pour le calmer, ni pour le gronder (surtout pas !) avant au minimum plusieurs heures. S’il se calme, laissez-le revenir vers vous de lui-même.

 

Etape 2 : gérez les blessés

En cas de griffures ou de morsure, les personnes blessées doivent consulter un médecin dans les plus brefs délais : le risque d’infection est très élevé ! Par ailleurs, le chat ayant mordu ou griffé devra impérativement faire l’objet d’une surveillance sanitaire (article 223-35 du Code Rural) également appelée « surveillance rage ».

 

Etape 3 : contactez votre vétérinaire

Appelez votre vétérinaire dès que possible : si l’agressivité persiste, que l’isolement n’est pas possible, ou si vous êtes terrorisés par ce qui vient de se produire, faites hospitaliser votre chat chez votre vétérinaire.

 

Dans certains cas, il est préférable de faire intervenir un vétérinaire à domicile, afin qu’il se charge, en toute sécurité, du transport, sous sédation si nécessaire. En effet, un chat en panique est généralement anorexique, et il sera probablement impossible de lui faire avaler un sédatif pour réussir à le manipuler…

 

Etape 4 : des causes médicales ?

Un examen vétérinaire, sous tranquillisation si besoin, est indispensable. Nombre de maladies peuvent rendre un chat irritable et agressif, selon sa sensibilité personnelle. Citons par exemple les maladies hormonales, les maladies internes, les affections qui génèrent de la douleur, une infection parasitaire massive (par des puces notamment) ou encore la rage, bien entendu, même si elle est rarissime.

 

Etape 5 : prise en charge comportementale !

Un examen comportemental complet par un vétérinaire qualifié est indispensable.

 

Celui-ci devra identifier un éventuel trouble comportemental sous-jacent : chat irritable, chat peureux, chat d’humeur fluctuante, anxieux…etc. Ce « fond » comportemental peut avoir été une base à l’accès de colère agressive.

 

Ensuite les éléments qui ont déclenché la crise eux-mêmes devront être bien étudiés : le chat possède une mémoire hypersensible et les mêmes causes pourraient produire les mêmes effets, y compris au niveau des émotions… Pour lutter contre une récidive, le chat ne doit pas être placé à nouveau dans les mêmes conditions de stress intense.

 

La prise en charge permettra d’évaluer le danger, en fonction du mode de vie du chat et des personnes qui vivent avec lui. Le vétérinaire pourra expliquer aux propriétaires ce qui s’est réellement joué pour leur chat, pour sortir des images traumatisantes et des fausses interprétations. « Vengeance », « folie subite », ou « besoin de punition » n’existent jamais chez le chat…

 

Etape 6 : une thérapie adaptée

Le vétérinaire peut proposer un médicament apaisant pour quelques semaines, afin de limiter l’irritabilité du chat, de l’aider à oublier cet épisode de panique et de sécuriser le retour à la maison, surtout si les propriétaires ont peur.

 

En parallèle, le vétérinaire pourra prescrire une réorganisation du territoire, une réorganisation des relations, un arrêt absolu des punitions ou des contraintes violentes, un enrichissement du milieu (cachettes, perchoirs) ou encore des jeux adaptés… Afin de donner au chat un cadre de vie plus apaisant.

 

Le pronostic d’une violente crise agressive varie en fonction du diagnostic, médical et comportemental, et de la flexibilité du milieu de vie, mais une prise en charge est toujours utile : une guérison est possible et certains chats ne récidivent jamais !

 

Comment prévenir ?

Bien sûr, l’immense majorité des chats  ne fera jamais vivre un tel épisode à ses propriétaires. Mais pour prévenir les agressions en général, rappelons ces règles de base chez le chat :

  • Un chat qui a peur, ou qui se sent harcelé, peut être très violemment agressif,
  • Un chat qui manifeste des signes de stress intense doit être isolé dans une pièce qu’il connaît pour qu’il puisse y trouver l’apaisement, en coupant le contact.
  • La punition physique est TOUJOURS inutile, improductive et dangereuse chez le chat, qui peut y réagir très violemment !
  • Essayer de « dominer » le chat, de « lui expliquer qui est le maître », est un non-sens dans cette espèce, et expose le propriétaire violent à une riposte agressive du même niveau.
  • Couper les griffes, mettre le chat dans une caisse de transport, lui faire avaler un comprimé : tous ces exercices qui nécessitent une contrainte doivent faire l’objet d’un entraînement non violent ! Si le chat ne se laisse pas faire, abandonnez momentanément : ne rentrez pas dans une escalade symétrique qui pourrait très mal se finir !
  • N’hésitez pas à consulter un vétérinaire qualifié en comportement si votre chat a des réactions démesurées ou agressives.